L’une des plus extraordinaire collection d’art « la Collection Michael Werner » est actuellement exposée au MUSEE D’ART MODERNE DE LA VILLE DE PARIS. Une partie importante des oeuvres présentées a récemment fait l’objet d’une donation au musée.

On ne peut pas dire que j’ai visité cette exposition, au sens classique du terme tout au moins. Je n’ai pas parcouru les salles, je ne me suis pas arrêtée, je n’ai pas observé les œuvres, comme je le fais pourtant d’habitude. Tout au plus ai-je vaguement lu en diagonal les cartels.

Non, j’ai couru de salle en salle, littéralement emportée, presque malgré moi avec l’impression de vivre une expérience unique. J’ai couru pendant toute l’exposition comme assoiffée. Je me demandais pourquoi et d’où venait cette étrange impression ;

Bien sûr chaque œuvre est exceptionnelle, bien sûr leur ensemble est unique, bien sûr voir, approcher de la peinture est pour moi vital, un besoin aussi nécessaire que celui de respirer. L’odeur, la matière, le toucher, la toile.

Pourtant il y avait une impression d’un autre ordre, comme si par le choix si particulier des artistes et des oeuvres, j’avais devant moi une sorte de … famille … car ce qui est donné à voir dans cette exposition c’est la « famille Werner », une autre manière d’approcher la transmission.

Une famille peu orthodoxe certes, une famille « horizontale », décalée, une famille de correspondances au sens surréaliste, une famille choisie, tissée de liens, d’expériences et d’affinités pour mieux interroger le monde.

Le livre de Donatien Grau sur la collection Michael Werner « le dernier château » (1) parle de « collection de vie ». Le collectionneur y invente un regard sur le passé, probablement aussi sur le futur. Pour Donatien Grau, la collection est un reflet de la biographie de Michael Werner, mais une biographie en mouvement, « conçue alors comme l’ensemble des paroles échangées, des réflexions construites, des aventures communes ».

« Ma donation, ma collection ne sont pas des fictions. Elles retranscrivent la réalité des personnes avec qui j’ai vécu, travaillé, construit une aventure commune (…) » dit Michael Werner.

La collection « résulte de ce processus de rencontres, qu’il convient d’aborder dans son déroulement, afin de mieux saisir l’unité personnelle de cet ensemble d’œuvres ».

Donatien Grau voit la donation « comme la parfaite retranscription d’une vie : les rencontres de Michael Werner (dont ) l’aspect le plus crucial est donc celui de la transmission ».

C’est un lieu commun que de qualifier la relation entre l’artiste et le galeriste de « maritale » poursuit Donatien Grau. (…) Dans le cas de Michael Werner, les relations avec les artistes ont constitué son véritable mariage, qui a duré plus longtemps même que les unions qui portèrent socialement ce nom ».

Cette famille est incontestablement une catégorie à part, dépassant les classifications habituelles.

Peut-être, analyse Fabrice Hergott, directeur du musée d’art moderne, dans le catalogue de l’exposition, « (…) se dessine-t-il en creux un autoportrait, le portrait d’une vie faite de rencontres, d’idées suivies au gré des engouements et des amitiés. Mais, au-delà de la figure de Michaël Werner, il se peut que nous assistions ici à une vaste inflexion du temps et de l’espace qui condense comme jamais cela ne s’est fait ( sans doute comme jamais cela n’a pu se faire) près de deux siècles d’une histoire complexe, douloureuse et passionnée ».

« (…) Les œuvres ont en effet été choisies non selon les classifications traditionnelles, mais selon les affinités profondes qui lient les artistes, si diverses que soient leurs pratiques et leurs démarches, dans leur recherche inlassable de formes et de figures nouvelles (…) ».

Alors allez voir cette extraordinaire collection et laissez-vous emporter par cette magnifique aventure qui prouve que la transmission a vraiment de multiples visages.

Yaël HALBERTHAL

Sur l’exposition Michael Werner : http://mam.paris.fr/fr/expositions

Sur la collection Michaël Werner : http://mam.paris.fr/fr/collection

Catalogue de l’exposition Michael Werner

(1) Donatien Grau « Le dernier château – sur la donation Michael Werner » Manuelle Editions