Dans CENDRILLON, son dernier spectacle au théâtre de l’Odéon d’après le mythe de Cendrillon, Joël POMMERAT également auteur du texte, signe une  mise en scène envoutante, sombre et lumineuse qui renvoie implacablement au questionnement sur l’origine et à la construction de l’individu qui ne peut être sans blessure ni culpabilité.
Sombre, elle prend racine dans la blessure du manque originel : le rapport à la perte, la mort, la culpabilité, et la mémoire. Lumineuse par sa fonction initiatique sur la traversée des épreuves, la construction de l’identité, la conquête de la liberté sans oublier le rapport au temps et à l’oubli. Penchée sur le lit de sa mère mourante, la gamine comprend de travers les derniers mots de celle-ci. Elle se persuade qu’elle doit penser constamment à elle pour la garder vivante. Elle renonce dès lors à tout plaisir pour ne plus se concentrer que sur la mémoire de celle qu’elle aimait plus que tout au monde.

Daniel Loayza commente ce récit qui travaille aussi selon lui à formuler « (…) quelque chose qui à trait à la condition humaine, à la manière dont la question d’être soi est liée à la nécessité d’occuper une place dans les processus biologiques et culturels qui assurent la succession des générations.
«  (…) Comment l’enfant – un être d’abord rivé à la génération qui le précède  – parvient-il à se détourner de celle-ci pour prendre sa place d’homme ou de femme parmi ses contemporains ? C’est là une question sur laquelle les contes reviennent sans cesse (…) (in La pensée des contes, Anthropos, 2001). Il ne s’agit pas d’un simple passage du malheur au bonheur mais du renversement d’un état passif, aliéné ou dépendant, à un état de liberté, où l’héroïne accède à son propre charme et peut enfin rejoindre la vie qui lui est due (…) ».
«  (…) Tous les enfants ont été jetés dans le monde ; tous, un jour ou l’autre, y ont affrontés de plein fouet des expériences énigmatiques et parfois terribles. Face aux questions qu’elles soulèvent, chacun prend ses soutiens où il peut, c’est-à-dire d’abord à l’endroit même où il se trouve, fût-ce sur les grands chemins ou au fond des forêts sombres où les loups rôdent. On ne peut grandir qu’à ce prix.
Et c’est parce que les enfants se mesurent franchement à leurs interrogations qu’ils sont aussi passionnément attachés aux réponses qu’ils découvrent.

Le manque, l’absence, la perte, le silence  – la mort –  sont comme des fissures par où le sens menace de fuir. Les enfants essayent de les comprendre, même de travers, de comprendre vraiment – c’est-à-dire sans se contenter de répondre comme on bouche un trou. Par la voie du symbole, les contes (…) ramènent leur auditoire adulte au sentiment profond, originel, de ces risques et de ces vertiges du premier âge (…) ». Pour bien grandir, il faut se laisser rêver ; et comme pour rêver  il faut du temps et de la place, il faut aussi savoir oublier. Pour peu qu’on y consente, on peut se souvenir autrement. Dès lors, et par surcroît, le passé peut revenir – et c’est alors, comme par magie, que nous pouvons enfin l’entendre (…) ».

Yaël HALBERTHAL

Synopsis :

Une très jeune fille.
Sa mère meurt.
Juste avant de mourir cette femme essaye de parler à sa fille.
Mais elle est très faible, et la jeune fille n’entend pas très bien ses paroles à demi articulées.
La très jeune fille qui a beaucoup d’imagination, invente une « promesse » que sa mère lui demanderait de respecter.
De toute sa vie ne jamais cesser de penser à elle, à chaque instant, sous peine de la faire mourir « pour de bon » …
Ce malentendu mènera la très jeune fille à des extrémités de comportement, à se mépriser / à se dévaluer, et jusqu’à de très grandes souffrances.
Heureusement une fée immortelle, mais que sa condition ennuie, va lui venir en aide.
Puis sa rencontre avec un prince, orphelin lui aussi, rendra possible la compréhension de ses erreurs.

Joël POMMERAT

Cendrillon : Publication du texte de Joël Pommerat chez Actes Sud

http://www.actes-sud.fr/catalogue/jeunesse/cendrillon